LIMOUSE

1977

© E. Pineau
portrait limouse

« À une époque de félicité, déjà lointaine, les expositions qui retraçaient mes séjours, souvent prolongés, au Maroc suscitaient une kyrielle d’articles majoritairement laudatifs. Un de mes anciens élèves avait même conservé une interview que j’avais accordée à un journaliste, en 1947. J’y décris en ces termes les impressions délectables qui se dégageaient de mes voyages au Maroc et je puis dire qu’avec le temps, elles ne se sont pas tempérées : « Voyager au Maroc ne tient pas du périple d’Ulysse ni de celui de Byron. Je ne pense d’ailleurs pas que nombre d’aventuriers s’y soient fourvoyés. C’est un pays qui convient infiniment mieux aux gens d’inspiration baudelairienne, qui font place à l’observation et à la contemplation. Ici, un voyage est une invitation à suspendre le temps, à se livrer à une rétrospection nostalgique, à découvrir cette harmonie sourde et profonde que décelait Baudelaire dans le sens des couleurs de Delacroix. La pleine compréhension de cette observation pénétrante ne peut être que le fruit d’une connaissance intime du Maroc. Cette harmonie proviendrait-elle du soleil marocain ? Unique et saisissante, sa lumière crée des ambiances et des teintes contrastées. Pourtant, à travers toutes les nuances qu’elle projette, elle nourrit l’harmonie spirituelle et matérielle des Marocains.

Au cours de mes nombreux séjours là-bas, on m’a donné l’hospitalité dans d’humbles demeures comme dans de magnifiques riads. Les habitants partagent tous la même vénération pour l’harmonie, indépendamment de leur mode de vie. Elle est présente dans leurs croyances et leurs espoirs, de même qu’elle s’insinue dans les objets de tous les jours dont la fabrication reflète des traditions séculaires, comme les vêtements, les tapis ou les poteries. Les Marocains se sont subtilement enracinés dans cet environnement harmonieux. D’ailleurs, ils ne sont pas pour rien dans l’équilibre général de ce décor ambiant qui s’est constitué au fil des siècles. Je suis bien conscient que cette harmonie en toute chose, aussi bien visible que spirituelle, peut déconcerter un Occidental obsédé par le progrès et dominé par le matérialisme au point d’imposer aux autres cultures son engouement pour le neuf et le clinquant. Un Marocain ou un poète est doté d’une prédisposition pour percevoir une telle harmonie et s’imprégner de sa beauté. »

Carte Edy legrand

« Témoignage de l’affectueuse estime que me garda Edy Legrand. »

Document Limouse artcurial

« Artcurial avait acheté l’exclusivité de toutes mes œuvres, de 1974 à 1979 et, durant cette période, mes toiles marocaines furent présentées à l’exposition qui m’était consacrée, avenue Matignon, mais également à mes expositions montées par cette imposante galerie à l’étranger. »