1988
« Aujourd’hui, à 94 ans, j’assiste au déclin de mes forces. Pourtant, de jour comme de nuit, je ravive un flot de souvenirs. Je les rassemblerai dans mes mémoires, honorant ainsi le contrat que je viens de signer avec l’éditeur Grasset. Ce n’est pas tout. Si ma santé me le permet, j’honorerai l’invitation cordiale de mon ami Jean-Louis Barrault. Oui, j’évoquerai sur la scène de son Théâtre du Rond-Point ce que fut notre Saint-Germain-des-Prés, si éloigné des préoccupations existentialistes et si proche des tumultes de l’âme de Baudelaire, de ses émotions, de ses aspirations brisées, de sa détresse et de sa révolte.
J’évoquerai ces moments privilégiés de l’histoire de nos écrivains et de nos artistes baudelairiens, ceux qui œuvrèrent à Saint-Germain-des-Prés, un siècle durant. Car tous ont été des personnages d'exception. Ils avaient acquis une maîtrise éblouissante des ressources de la langue française. Ils ont su, par le lyrisme de leur imagination, par leur amour du beau et des civilisations antérieures, vaincre le prosaïsme, l'utilitaire, la trivialité ambiante, les préjugés indéracinables. Et tout cela leur a permis de vivre leur rêve et d'atteindre tous les sommets. »
Limouse, en compagnie de l’écrivain Jean-Paul Enthoven, éditeur chez Grasset, de l’ami et avocat de l’artiste Charles Benfredj et de la diseuse Pamina, représentant la Société Baudelaire, à l’occasion de la signature du contrat pour la publication des mémoires de l'artiste baudelairien. Limouse dut renoncer à ce projet et à celui de la causerie au Théâtre du Rond-Point en raison d’une aphasie qui le réduisit au silence, à l’approche de sa mort quelques mois plus tard.
Le cygne, figure emblématique de la collection sur le Saint-Germain-des-Prés des baudelairiens, dont l’histoire séculaire et méconnue aurait nourri les mémoires de Limouse. Cette collection, dirigée par Isée St. John Knowles et publiée chez Cohen & Cohen, comprendra une étude sur la vie et l’art de Limouse, peintre des Fleurs du Mal.